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Humour

L’humour au temps du coronavirus

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Avertissement : la lecture de cet article peut provoquer un besoin irrépressible d’abandonner son domicile pour aller acheter du papier toilette… car je commencerai en parlant de fluides.

La première édition de l’Encyclopédie Britannique (1711), donne deux synonymes dans sa définition de l’humour : « fluide » et « esprit ».

Dans son acception initiale, le terme « humour » trouve son origine dans le registre médical.

La théorie des humeurs, qui émergea dans la Grèce antique, fut transmise par les Arabes et fit l’objet de grandes tensions entre médecins et alchimistes du Moyen-Âge.

L’humour comme fluide

Hippocrate de Cos, considéré comme le père fondateur de la médecine, affirmait qu’il existait dans le corps humain quatre humeurs ou types de fluides (le sang, la bile noire, la bile jaune et le flegme).

Chez les personnes en bonne santé, ces quatre composantes étaient présentes en proportion équivalente. Mais l’existence d’une quantité plus importante de l’une d’elles provoquait un déséquilibre qui rendait l’individu malade.

Pour cette raison, jusqu’au XVIIIe siècle, certains médecins pensaient que la saignée pouvait guérir l’excès de sang ou que manger des agrumes contenait l’augmentation de flegme.

De là vient l’assimilation de l’humeur (et de l’humour) à un fluide.

L’humour est également apparenté à l’« esprit ». Nous devons cette généalogie à l’essayiste Joseph Addison, qui la décrivit en 1711 dans le journal The Spectator :

« Il semblerait que la Vérité fut fondatrice de la lignée lorsqu’elle conçut le Bon Sens. Celui-ci engendra ensuite l’Esprit, qui contracta mariage avec une femme nommée Rire […]. De cette union naquit un fils, qu’ils appelèrent Humour. L’Humour […], issu de parents dotés de qualités si diverses, possède un caractère hautement versatile. Il apparaît tantôt l’air grave et solennel, tel un magistrat ; d’autre fois, il adopte un style désinvolte et s’habille de manière extravagante, tel un saltimbanque. Il conserve toutefois beaucoup de sa mère, et pour cette raison, quel que soit son comportement, il réjouit toujours ceux qui désirent l’écouter ».

L’humour sur les réseaux sociaux

Cette capacité du fils de l’Esprit et du Rire à mettre en joie « tous ceux qui désirent l’écouter » (ou le lire) est quelque chose dont nous faisons l’expérience en ces temps de pandémie, à travers les messages diffusés sur les réseaux sociaux.

Selon les Mécanismes sémantiques de l’humour, développés en 1985 par Victor Raskin, deux critères – a priori antinomiques – au moins sont nécessaires pour qu’un texte soit considéré comme humoristique.

Par exemple, le tweet suivant a recours à deux éléments de communication différents, pour livrer une perspective positive de la quarantaine imposée par la lutte contre le coronavirus : « veux-tu passer le confinement avec moi ? ».

Étant donné la précipitation de certains citoyens à accourir dans les supermarchés afin d’acheter du papier hygiénique, les comparaisons de ce produit de première nécessité avec les biens les plus précieux abondent :

Les parodies de conversations imaginaires liées à la situation actuelle prolifèrent aussi sur les réseaux, comme cette image relative aux déclarations sur l’honneur pour les déplacements autorisés :


Twitter, CC BY-NC-SA

Ou ce tweet, sur la continuité de la vie sociale quant on est tout seul chez soi :

Parmi les formes d’humour les plus fréquentes dans ce type de messages, on rencontre des figures rhétoriques, comme celle de la prosopopée, qui consiste à attribuer des actions propres aux êtres humains à des objets inanimés.

Comme ces jeux de société qui se réjouissent à l’idée d’être enfin utilisés :


Facebook

Ou ces chiens qui arborent fièrement leur attestation sur l’honneur de sortie :

La compréhension de l’humour implique une triple compétence de la part du lecteur : générique, linguistique et idéologique.

Ainsi, sa compétence générique lui permettra d’identifier tel type de messages comme appartenant au genre de la parodie.


Facebook, CC BY-NC-SA

Grâce à ses capacités linguistiques, le lecteur sera en mesure de déchiffrer l’implicite dans les mots du message reçu.

Quant à sa compétence idéologique, elle lui permettra de comprendre les allusions sous-jacentes à certaines publications :


Facebook, CC BY-NC-SA

Fonction sociale

Comme l’écrivait Henri Bergson, le rire remplit une fonction sociale, puisqu’elle aide à se libérer de sa propre angoisse en se moquant de soi de façon collective.

Et pour Jean Château, c’est un phénomène effectif qui nourrit le lien entre ceux qui rient.

Mais je pense que cette définition de Robert Escarpit est celle qui le mieux correspond au moment d’incertitude et d’isolement que nous traversons avec le confinement :

« L’humour est l’unique remède qui distend les nerfs du monde sans l’endormir, lui donne de la liberté sans le rendre fou et met entre les mains des hommes, sans les abattre, le poids de leur propre destin ».

Et souvenez-vous : le papier hygiénique peut aussi servir à sécher les larmes de rire.

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Ana Mancera Rueda, Profesora Titular de Lengua Española (Facultad de Filología), Universidad de Sevilla

Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons.

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